Après Donauschingen, je demande au gps de me faire un itinéraire direct jusqu'à
Schaffhausen, en Suisse, pour retrouver l'euro-route 6, mais surtout
pour tomber pile poil sur les Rheinfall, les célèbres chutes du Rhin,
notre Niagara à nous. Je parcours des collines à travers bois et
villages perdus, c'est magnifique, mais les descentes et surtout les
montées sont terribles. Maintenant je sais ce que ça fait de monter du
21%. C'est dans ce genre de raidillon que j'ai passé le 2000e km.
En arrivant à Schaffhausen, pas besoin de chercher : comme la ville
n'est pas trop bruyante (on est samedi aprèm), on n'entend que le bruit
des chutes. Il est vrai que c'est impressionnant. Malgré un prix
déraisonnable (on est en Suisse), j'achète encore un magnet pour ma collection. Il va falloir que je trouve un grand frigo.
Ce n'est pas tout ça, mais il est 19h et je ne sais pas encore où
dormir. Repassée la frontière allemande, à 2km, je trouve tout de suite
un petit bout de champ caché. Quand la nuit est déjà bien tombée, je
vois 2 petites loupiotes arriver : 2 vélos-sacoches avec leurs
cyclistes. "We are looking for a place to camp". Je préfère quand on est
plusieurs. Par contre il est trop tard pour bavarder.
jouer à "saute-frontières" |
les chutes du Rhin |
Jour 26
Matinée "cape de pluie". Je suis le Rhin sur sa rive droite, donc au
Nord, donc en Allemagne (le café est moins cher). Au loin au Sud je vois
bien les Alpes enneigées... tant qu'il ne pleut pas. Vers midi je
traverse le Rhin au confluent de l'Aare (Aare qu'on a traversé
le 14 juillet à Interlaken, avec Florian et Régine, un jour de pluie
également). Du coup je trouve -enfin- cette route 6 que je n'ai plus
qu'à suivre. Et midi c'est aussi l'heure du retour des éclaircies.
Et 13h c'est le retour de la pluie ! ...qui ne s'arrêtera plus vraiment. Ce soir il faut que je trouve un
abri couvert pour ne pas avoir à monter la tente. Sinon demain elle sera
mouillée, et s'il pleut encore, impossible de la faire sécher. J'en
étais là de mes réflexions, dans la dernière zone de forêt avant la
grande banlieue de Bâle, quand je passe devant une cabane avec une
grande avancée abritée, une fontaine (toilette et surtout lessive). Il
est tôt (15h) mais j'ai déjà fait 85 km. Bref c'est le bon plan. La
pluie redouble. Il y a déjà un couple de cyclo-voyageurs avec un bébé, mais ils repartent
sous les intempéries.
Soirée tranquille. Juste des chasseurs qui
tirent dans tous les coins à la tombée de la nuit quand on n'y voit plus
rien, relayés par les feux d'artifice de la fête nationale.
Rhin |
confluent de l'Aare et du Rhin |
Jour 27
Levé avec le jour, presque rien à ranger puisque je n'ai pas eu
besoin de monter la tente, et presque rien à manger. Du coup à 9h je
suis à Bâle. J'y reste une bonne heure, parce que je veux aller à la
gare attraper du wifi, mais il y a 2 gares, la suisse et l'allemande.
Évidemment, je tombe sur la mauvaise.
Retour en France, ses pistes cyclables
affligeantes, l'impression d'être inférieur aux autres parce que l'on
n'est pas en voiture...! Heureusement on arrive vite sur le bord du canal du Rhône au Rhin.
J'arrive à Mulhouse vers 13h, mais je ne sais pas trop quoi faire dans
ce centre-ville. J'ai perdu mon antivol, et toujours pas à manger. Je ne
me souvenais plus qu'il n'y a pas de supermarché en centre-ville en
France. Je mange un kebab énorme, puis je prends mon courage et hop !
Raid dans la banlieue, merci le gps, Décathlon, antivol et gaz (ça faisait 2 jours que
je n'en avais plus). Ça va tout de suite mieux ! Retour au canal et à sa fabuleuse piste... que je quitte à Illfurth pour trouver un petit commerce. Et en plus maintenant j'ai à manger !
Je me retrouve sur ce canal que j'ai emprunté il y a 2 ans pile poil, à
peu près à la même heure de la journée, même lumière. Et donc bien sûr
je retrouve facilement l'endroit où j'avais bivouaqué, et même le
village à 500m où il y avait de l'eau !
banlieue de Bâle |
Bâle |
Bâle |
canal du Rhône au Rhin |
Eglingen |
Jour 28
Grr !
Le temps est tout gris. Je profite que par miracle la tente n'ait pas
été mouillée par l'humidité de la nuit pour tout plier en urgence. La
pluie arrive au moment où je pars. Déjeuner à l'abri dans la cabane en
bois au bord du canal repérée il y a 2 ans déjà.
5 km plus loin,
je vais dans un village, Dannemarie. À 9h00 les courses de la journée
sont faites, j'ai trouvé du free wifi, il n'a plus l'air de vouloir
pleuvoir, tout va bien. Je mets pas mal de temps
à envoyer les messages parce que je suis interrompu plusieurs fois par
des gens qui veulent faire la causette. C'est plutôt sympa. 10h30, il y a
un chouette petit espace le long du canal toujours, avec des bancs, je
suis "obligé" de m'arrêter sinon je vais arriver trop tôt à l'étape. Tant que j'y suis j'y reste manger.
Ensuite c'est un peu monotone : canal, pédalage, vent de face... Retour
sur les routes ordinaires après Montbéliard, premières montées dans le
Jura.
Arrivé à 16h30 au camping de St-Hyppolite, où là aussi j'avais dormi il y a 2 ans. Le temps est resté couvert toute la journée, sans pluie
Arrivé à 16h30 au camping de St-Hyppolite, où là aussi j'avais dormi il y a 2 ans. Le temps est resté couvert toute la journée, sans pluie
le Doubs |
Saint-Hippolyte |
Jour 29
Départ tranquille de St-Hyppolite vers 9h30, après les courses de
midi et le café wifi. La traversée du Jura dans le sens de la largeur,
c'est sport : après la montée en altitude, pour aller en Suisse, il faut
franchir la combe du Doubs, c'est à dire tout redescendre, traverser la
rivière-frontière, et tout remonter. On ne parlera pas de ces quelques
conducteurs -tous français- qui frôlent alors qu'il n'y a personne en
face. Pique-nique dans la montée, traditionnel séchage de la tente (même si je sais que je n'en ai pas besoin ce soir).
L'après-midi se passe un peu en mode "pilotage automatique". La fatigue
du retour à la montagne se fait sentir. Je suis la ligne rose sur
l'écran du gps, parfois je m'en écarte, le soleil tape dur. Col de la
Vue des Alpes. Le temps est brumeux, on ne les voit pas bien, les Alpes. La
descente sera longue, d'ailleurs il y aura pas mal de remontées. À 18h30
je suis -enfin- arrivé.
Saint-Hippolyte |
Goumois |
lac de Neuchâtel |
Jour 30
On part à 2 (Régine m'accompagne jusqu'à Genève) à 11h30. Ce n'est
pas qu'on s'est levé tard, mais il y avait plein de choses à faire avant
de partir. Du coup on a pris le train du Val de Travers pour accélérer.
À 14h on a fait... 3km !
Après ça monte dans le Jura, la plupart du temps par des petites routes
paisibles. Col de l'Aiguillon. En redescendant sur Baulmes, dans un
virage, on a une vue simultanée sur le lac de Neuchâtel et le Léman.
Rarissime.
À peine Régine m'a-t-elle dit qu'elle s'arrêterait
bien, on trouve une cabane. Ça devient une habitude, très pratique
d'ailleurs. Je retourne chercher de l'eau, et voilà ! Ça tombe bien
parce que la pluie pourrait bien tomber en fin de nuit, et nous on est
bien à l'abri.
Fleurier |
lac de Neuchâtel |
Baulmes |
Jour 31
Il a plu cette nuit, on était bien à l'abri dans la cabane. Mais
dormir sur des tables étroites ne favorise pas un repos réparateur : dès
qu'on bouge on manque de tomber !
Départ à 8h30, route vallonnée jusqu'à Vallorbe. Courses. Comme il
commence à pleuvoir, on cherche un endroit abrité pour faire chauffer un
café. On trouve sur le coté de la gare, avec un canapé ! On
monte au lac de Joux par l'itinéraire vélo, une petite route non
goudronnée, qui monte fort... et on arrive dans le Haut Jura. On est un
coup en France, un coup en Suisse. Repas dans un abribus. À La Cure, on
prend la route du lac Léman, et c'est une longue descente, avec une vue
saisissante sur le lac Léman. Ensuite Régine connaît par cœur, on
rejoint Genève par de toutes petites routes.
lac de Joux |
Jour 32
Départ à 7h30 de Genève. Régine part en même temps que moi, mais elle va... au travail !
La traversée de Genève est bien fléchée, mais on fait vraiment des
tours et des détours. À cause de travaux je perds la Via Rhôna à la
sortie de Genève. Beurk les zones industrielles ! On est en Suisse mais
elles sont vilaines comme partout ailleurs.
Je retrouve l'itinéraire, qui me promène partout dans les montagnes, mais pas au bord du Rhône. Et le gps qui m'envoie sur une
route en gravier, puis une qui n'existe pas. Bref, à 13h, à Seyssel
(vraiment joli), je vois un panneau routier "Genève 41km", et moi j'en ai
fait presque 75, avec un sacré dénivelé.
Là j'abandonne définitivement l'idée d'aller jusqu'à Grenoble ce soir.
Je me goinfre dans une boulangerie, pour le prix d'un café en Suisse,
c'est bon d'être revenu dans le tiers monde !
J'explique à la boulangère la différence entre un double et un allongé.
J'ai bien un allongé, j'ai oublié de lui dire que ça ne pouvait pas
être le même prix que deux cafés.
L'après-midi, la Via Rhôna en Savoie et dans l'Ain est parfaite. Je la
suis jusqu'à Bellay, courses, eau aimablement proposée par les dames de
l'office du tourisme. Ensuite je repars dans les montagnes, plutôt les
collines, pour des petites routes où les chances de trouver un coin de
bivouac sont importantes. À 18h je me pose pour la dernière nuit du
voyage.
Un coin comme j'aime. Probabilité de rencontrer un humain : 0,001%.
Probabilité d'être dérangé par des sangliers cette nuit : 80%. Je suis trop content de ne pas passer la dernière nuit dans un camping, même sympa.
Genève |
le Rhône dans les environs de Collonges |
Seyssel |
Seyssel |
Chanaz |
Jour 33
Finalement, même pas de sangliers cette nuit. Il a fait vraiment
froid, mais j'ai bien dormi. Dernier lever, dernier pliage de tente,
dernier départ... bref, dernier jour...
Je retrouve la Via Rhôna, superbe, qui m'amène à Morestel. À partir de
maintenant, c'est plein sud. D'une hauteur, j'ai déjà aperçu au loin la
Chartreuse, le Vercors, et la vallée entre les deux... Ça sent la maison
!
À midi, je fais sécher la tente : c'est plus facile dans un champ que ce soir dans l'appartement. Au loin je vois l'arête de la Sure, en Chartreuse.
L'après-midi je suis la petite ligne rose du gps, que je recalcule
plusieurs fois parce qu'elle ne passe pas toujours où je veux. Et à
16h30, j'arrive à la voie verte que je connais si bien. Plus qu'une
heure. Musique en pédalant et... c'est fini !
au fond; la Chartreuse |
le Porte de Groslée |
le Rhône |
après Les Abrets |
on voit de mieux en mieux la Chartreuse |
lac de Paladru |
à gauche la Chartreuse, à droite le Vercors, entre les deux la maison |
et voilà ! |